De la mécanique des fluides à la dépollution durable des sols : mon parcours entre recherche et innovation
- Amir ALAMOOTI

- 21 oct.
- 3 min de lecture

Amir ALAMOOTI
Merci beaucoup pour votre témoignage
Peux-tu nous présenter ton parcours et pourquoi tu as décidé de faire une thèse ?
L’un des grands défis environnementaux d’aujourd’hui est la pollution, et la pollution des sols en est une composante majeure. Elle commence souvent en surface, par exemple à la suite d’un déversement accidentel, puis se propage progressivement en profondeur jusqu’à atteindre les nappes phréatiques, des ressources essentielles pour la vie humaine.
J’ai réalisé ma thèse à l’École nationale supérieure d’Arts et Métiers (ENSAM), en collaboration avec le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) et l’ADEME, qui ont financé ce projet. Dans ma thèse, j’ai travaillé sur la dépollution de sols contaminés par des DNAPL (Dense Non-Aqueous Phase Liquids), des polluants organiques non miscibles à l’eau et plus denses que l’eau. En raison de ces propriétés, ils peuvent s’enfoncer sous la nappe phréatique et former des couches liquides distinctes. Ces composés sont lourds, persistants et adhèrent fortement aux surfaces du sol, ce qui les rend particulièrement difficiles à éliminer.
Mon travail de recherche visait à développer de nouvelles méthodes basées sur l’injection de solutions polymères pour mobiliser ces polluants depuis les zones proches de la nappe vers un puits de récupération, permettant ainsi de nettoyer le sol et l’eau souterraine. J’ai testé différents agents de dépollution tels que des tensioactifs (semblables à ceux utilisés dans les liquides vaisselle), des alcools et des sels. Pour évaluer les différents scénarios de dépollution et éviter tout risque de recontamination, j’ai combiné expérimentations en laboratoire, modélisation numérique et outils d’évaluation des risques.
Qu’as-tu retenu de cette expérience ?
Au-delà des résultats scientifiques, ma thèse a été une véritable école de gestion de projet. J’y ai appris à planifier, hiérarchiser et mener à bien des travaux de recherche complexes, mais aussi à encadrer un petit groupe et à collaborer entre disciplines. J’ai également appris à canaliser ma curiosité en fonction des besoins du projet à aborder un problème sous plusieurs angles : efficacité technique, durabilité environnementale, viabilité économique et effets secondaires potentiels. Cette capacité à envisager un même défi selon différents points de vue a été l’un des apprentissages les plus précieux de mon parcours doctoral.
Au cours de ma thèse, j’ai eu l’opportunité de publier six articles scientifiques et de déposer un brevet, et j’ai eu l’honneur de recevoir le Prix Pierre Bézier de l’ENSAM, récompensant la meilleure thèse au niveau national parmi 130 candidats , en reconnaissance de la qualité et de l’originalité de mes travaux. Cependant, j’ai compris avec le temps que les publications et les distinctions ne font pas tout. La thèse est avant tout une période d’apprentissage : autonomie, organisation, gestion des incertitudes et travail en équipe. Ces compétences, souvent moins visibles, sont pourtant celles qui font la différence dans la suite d’une carrière.
Quel a été ton parcours après la thèse ?
Après ma thèse, j’ai rejoint le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) en tant que chercheur postdoctoral, où j’ai travaillé sur la modélisation numérique de la distribution des polluants dans le sous-sol, notamment dans le cadre de variations du niveau des nappes liées au changement climatique. Cette expérience m’a permis d’approfondir ma compréhension des processus hydrogéologiques et du comportement à long terme des contaminants dans les milieux naturels.
Actuellement, je suis chef de projet en dépollution des sols chez INSAVALOR/PROVADEMSE, où je mets à profit mes compétences techniques et scientifiques pour concevoir et coordonner des stratégies de dépollution innovantes et économiquement viables. Mon rôle consiste à faire le lien entre la recherche et le monde industriel, en transformant les connaissances scientifiques en solutions opérationnelles et durables pour les sites contaminés.
Quels conseils donnerais-tu à un étudiant qui souhaite se lancer dans une thèse ?
La curiosité est le moteur principal d’une thèse. Elle pousse à poser des questions, à explorer des idées nouvelles et à prendre des risques scientifiques, même lorsque certaines idées semblent irréalistes au départ. Publier est important, bien sûr, mais ce n’est pas tout. Une thèse est aussi une occasion unique de développer des compétences scientifiques et humaines : expérimentales, numériques, mais aussi en communication, travail d’équipe et organisation. Les conférences, par exemple, sont d’excellentes opportunités pour gagner en confiance et élargir son réseau professionnel. Enfin, je dirais qu’il faut vivre pleinement cette expérience : rester curieux, ouvert et persévérant. Ce sont ces qualités qui guideront vers une carrière riche et épanouissante, que ce soit dans la recherche ou dans l’ingénierie appliquée.





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