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Thomas DANIEL, Ingénieur R&D Deep Learning chez Kinetix


Merci beaucoup d'avoir accepté l'interview.


Pourriez-vous nous présenter votre parcours avant la thèse ?

J'ai intégré l'École des Ponts en 2014, après deux années de classes préparatoires au lycée Masséna à Nice. L'École des Ponts a la particularité de proposer un large choix de spécialités dès la deuxième année, ce qui m'a permis d'étudier la modélisation et la simulation numérique au sein du département Génie Mécanique et Matériaux, tout en continuant à suivre des cours de mathématiques. Au cours de mon année de césure, j'ai pu approfondir ces thématiques à l'ONERA (Office national d'études et de recherches aérospatiales), puis chez OCAS NV en Belgique, un centre de R&D pour la sidérurgie appartenant à ArcelorMittal et à la région Flamande. J'ai ensuite suivi le master recherche M4S (Multiphysics and Multiscale Modeling of Materials and Structures) à l'École Polytechnique, en parallèle de ma dernière année à l'École des Ponts, avant d'effectuer mon stage de fin d'études chez Dassault Aviation. Ce parcours m'a permis de découvrir les mondes de la recherche et de l'industrie, et d'acquérir de solides connaissances en modélisation et simulation pour la physique (et plus particulièrement pour la mécanique). J'ai eu la chance de recevoir deux prix remis par la Fondation des Ponts, le Prix Pasquet 2018 et le prix du meilleur stage scientifique de première année pour un stage effectué au laboratoire IUSTI-CNRS en 2015.


Qu'est-ce-qui vous a amené à faire une thèse CIFRE par la suite ?

J'avais envie de continuer à apprendre et à me former par la recherche, tout en gardant un lien avec l'industrie aéronautique. SafranTech et le Centre des Matériaux des Mines m'ont offert l'opportunité de faire une thèse utilisant l'intelligence artificielle pour la simulation d'aubes de turbine haute pression dans un turboréacteur. C'était pour moi l'occasion rêvée de me former au machine learning et donc de sortir de ma zone de confort, tout en appliquant mes travaux à des problématiques de méthodes numériques et de modélisation et simulation physiques que je maîtrisais déjà en partie grâce à mes études et mes stages. J'ai eu l'immense privilège de rencontrer des personnes remarquables sur les plans scientifique et humain, que ce soit à Safran ou au Centre des Matériaux, et plus particulièrement d'être encadré par d'excellents chercheurs et ingénieurs de recherche : David Ryckelynck (mon directeur de thèse aux Mines), et Fabien Casenave et Nissrine Akkari (mes encadrants à SafranTech). Avoir de bons encadrants est essentiel pour faire sa thèse dans de bonnes conditions, et je dois dire que j'ai été très chanceux sur ce point. J'ai passé trois belles années de thèse grâce à eux.


Quels sont les avantages d'une thèse CIFRE ?

Les contrats CIFRE permettent de faire une thèse tout en faisant partie d'une équipe d'ingénieurs de recherche dans une entreprise. Le sujet de thèse est motivé par une problématique industrielle, ce qui offre l'opportunité au doctorant de valoriser ses travaux en les appliquant dans le cadre des projets de l'entreprise, et de participer à la rédaction de brevets d'invention. Pour moi, Safran était l'entreprise idéale pour cela : les défis technologiques et scientifiques du secteur aéronautique sont nombreux et passionnants, et le positionnement de SafranTech à mi-chemin entre la recherche et l'industrie donne un cadre parfait pour réaliser une thèse CIFRE au contact de docteurs ingénieurs de haut niveau.


Quel a été votre parcours professionnel après la thèse ?

J'ai profité de mes compétences en intelligence artificielle acquises pendant la thèse pour démarrer ma carrière en tant qu'ingénieur R&D en deep learning. L'intelligence artificielle (IA) est un domaine passionnant, aux applications multiples et variées, et qui évolue très vite : travailler en R&D dans ce domaine nécessite d'apprendre de nouvelles choses en permanence, et de constamment remettre en question ses acquis pour progresser. J'ai d'abord travaillé chez Dassault Systèmes sur des thématiques liées au deep learning sur des nuages de points issus de captures LiDAR. J'ai ensuite rejoint Kinetix, une start-up fondée en 2020 qui développe une plateforme permettant de transformer des vidéos en animations 3D modifiables, le tout grâce à des algorithmes d'IA. J'y ai rencontré de jeunes ingénieurs R&D très talentueux. Travailler dans une start-up est très enrichissant, notamment parce que cela facilite les interactions avec des collègues exerçant d'autres métiers et ayant des parcours complètement différents.


Comment s'est passée la transition du secteur aéronautique vers celui de l'animation 3D ?

Plutôt bien, même si vu de l'extérieur ces deux domaines n'ont absolument rien à voir. Le dénominateur commun, dans mon cas, c'est le machine learning. Je l'utilisais pour simuler des phénomènes physiques à Safran, et je l'utilise maintenant pour animer un personnage en 3D, que ce soit pour l'extraction du mouvement à partir d'une vidéo ou bien pour proposer des outils permettant par exemple de retravailler une animation. Mes compétences en physique me sont aussi utiles dans mon nouveau métier, une animation pouvant être rendue plus réaliste si elle respecte les lois de la physique.


Quel conseil donneriez-vous aux personnes envisageant de faire une thèse ?

Je leur dirais de ne pas prêter attention aux arguments selon lesquels faire une thèse conduit à s'enfermer dans un domaine très précis, et donc à se fermer de nombreuses portes. Cela peut être vrai dans certains cas, mais dans mon cas, la thèse m'a permis au contraire de me former à de nouvelles techniques, et donc de compléter mon profil d'ingénieur en modélisation et simulation physiques par des compétences en mathématiques appliquées, en informatique, et en intelligence artificielle. Grâce à cela, j'ai pu élargir le panel de métiers auxquels je pouvais candidater. Faire une thèse, ça n'est pas que se spécialiser sur un sujet très pointu, c'est aussi acquérir une certaine méthode de travail pour aborder des problématiques n'ayant pas de solutions évidentes.

En revanche, faire une thèse n'est pas toujours pertinent selon les projets que l'on a à moyen terme. Dans le monde de l'entreprise, avoir une thèse n'est pas forcément un pré-requis pour occuper des postes d'ingénieur R&D ou d'ingénieur de recherche, cela dépend de l'entreprise. Les trois années de thèse ne sont d'ailleurs pas systématiquement considérées comme de l'expérience professionnelle, en fonction de la politique de recrutement et des profils recherchés par l'employeur. Pour les personnes souhaitant faire de la recherche appliquée en entreprise, la thèse CIFRE est un réel atout pour avoir une première expérience significative en entreprise à valoriser en tant que telle auprès des recruteurs. Je conseillerais donc aux étudiants hésitant à faire une thèse de se poser les questions suivantes : « Quel métier voudrais-je exercer plus tard ? Les offres d'emplois pour ce métier demandent-elles d'avoir fait une thèse ? Ai-je le goût d'apprendre et de travailler sur des sujets complexes, ou bien ai-je tendance à m'agacer quand la solution à un problème n'est pas directe et nécessite de se tromper de nombreuses fois ? Mon sujet de thèse m'ouvre-t-il des portes et me permet-il d'élargir mon profil ? ».

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