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Trouver sa passion et son talent pour faire une thèse


Rachna BHOONAH
Rachna BHOONAH

Merci beaucoup d'avoir accepté l'interview.


Peux-tu nous présenter ton parcours et pourquoi as-tu décidé de faire une thèse ?

J’ai fait une licence en physique à l’Université Pierre et Marie Curie (Sorbonne Université), avec une année d’échange à l’Université de Chicago. Par la suite, je voulais orienter ma carrière vers le développement durable et j’ai fait un Master en Energies Renouvelables et Efficacité Energétique à l’Université PSL. J’ai fait mon stage de fin d’études et une année comme consultante en écoconception. Je réalisais des analyses environnementales de produits afin d’aider les fabricants à réduire leurs impacts environnementaux. Toutefois, je voulais pousser plus loin la réflexion sur les méthodes utilisées dans ces analyses et faire avancer les connaissances sur le sujet. Je cherchais un milieu plus stimulant intellectuellement. J’ai demandé conseil à plusieurs personnes, souvent des inconnus que je contactais sur Linked In par exemple, et j’ai compris que je devais faire une thèse. C’était donc l’envie de découvrir de nouvelles choses et développer des méthodes plus robustes, mais aussi l’envie de travailler pour produire des connaissances en libre accès (en contraste à des entreprises privées qui travaillent pour produire des connaissances confidentielles) qui m’ont poussé à m’orienter vers la recherche. J’ai donc fait une thèse à Mines Paris-PSL.


Comment bien choisir son sujet de thèse ?

Je pense qu’il est important d’identifier deux choses : notre talent et notre passion. En couplant ces deux, on trouve l’énergie pour travailler, même si ce n’est pas toujours simple de faire une thèse. Pour ma part, mon intérêt se trouvait dans le sujet du développement durable. Avoir une passion permet de ne pas laisser tomber facilement, comme on a un objectif qui en découle. Aussi, le talent permet de savoir que nous avons la capacité de réussir dans le cadre méthodologique donné. Dans mon cas, c’était la programmation et le développement de modèles : j’avais confiance en mon talent pour produire des algorithmes visant à résoudre des problèmes posés. Ainsi, même si j’avais parfois du mal à trouver le bout, je me voyais progresser et cela me donnait la motivation de continuer. Ce talent peut se trouver dans pleins de domaines différents : le talent pour l’écriture, pour la synthèse d’information, pour différents types d’expérimentations… Une fois qu’on a identifié ces deux choses, on peut chercher une offre ou définir son sujet en fonction. C’est ainsi que j’ai trouvé une offre de thèse visant à quantifier les effets de la qualité de l’air intérieur sur la santé des occupants afin de réduire les impacts environnementaux du bâtiment, et j’ai candidaté.


Comment avez-vous vécu votre doctorat ?

Dans la globalité, je l’ai très bien vécu. Il y a bien-sûr eu des hauts et des bas, mais j’arrivais à tenir le cap en sachant que j’avais un objectif très clair (et j’en étais chanceuse, comme on ne connait pas toujours très bien ses objectifs de thèse). De plus, j’ai eu l’aide de plusieurs personnes extérieures pour bien développer mes modèles et produire des résultats. C’était un sujet que je trouvais important pour la société, et en lien avec ma passion, mais il était aussi assez éloigné de mes connaissances. Comme dans beaucoup de travaux de recherche, il a fallu sortir de ma zone de confort pour explorer de nouveaux domaines. C’était une tache dure, mais aussi très gratifiante. Les collaborations menées m’ont permis de mieux combler ces lacunes, et aussi faire un séjour dans une équipe de recherche danoise. J’ai eu la chance d’être bien entourée par des collègues avec qui on passait de bons moments autour des repas, des jeux ou lors des déplacements pour des conférences. Choisir un sujet c’est une chose, mais il faut aussi un peu se renseigner sur l’équipe, par exemple en discutant avec des doctorant.e.s ou stagiaires en plus des encadrant.e.s. En ce qui concerne ma vie privée, les deux premières années de thèse étaient peu affectées. Pendant la dernière, je dois avouer que j’avais un peu moins d’énergie à donner à certaines activités. Mais j’ai quand même continué à voir des proches, à sortir, faire des jeux et profiter de mon temps libre.


Les femmes sont sous représentées dans le domaine du STEM (Science-Technology-Engineering-Mathematics), comment s'est déroulé votre doctorat ? Et dans levotre travail actuel ?

La représentation des femmes dans les STEM dépendent des institutions, et je me trouvais dans une école d’ingénieur où presque tous les professeurs étaient des hommes. C’est moins le cas parmi les étudiant.e.s et doctorant.e.s, et bien heureusement. Cela prouve que les choses évoluent. Il était un peu moins simple de se projeter durant ma thèse, comme les exemples que j’avais étaient des exemples masculins. J’étais toutefois déterminée à me faire une place et prouver (à moi et aux autres) que les femmes peuvent faire de la recherche, de la programmation informatique, des mathématiques dans le domaine de la construction, et enseigner aux étudiants aussi de faire de même. Je fais actuellement un postdoc à Agro ParisTech. Je suis entourée de plus de femmes, des plus jeunes à celles qui ont des dizaines d'années d’expérience. Je me rends alors compte que la représentativité est très importante. J’arrive à mieux me projeter comme enseignante-chercheuse, professeure ou même directrice de recherche. Si j’ai un conseil à donner aux jeunes femmes qui hésitent à faire un métier en STEM, c’est de se lancer. Même si on n’a pas beaucoup de « role-models » autour de nous, on peut tenter de contacter certaines afin de discuter et de se sentir moins seule. Mais aussi, on peut aussi tenter de devenir une « role-model » pour les futures générations.

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