D’un rêve d’enfant à la direction du Laboratoire LaRESE : science, engagement et innovation au service de la souveraineté énergétique de Djibouti.
- Chaker IBRAHIM

- 30 oct.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 31 oct.

Merci beaucoup pour votre témoignage
Pouvez-vous nous parler de votre parcours académique ?
Mon parcours a débuté à Djibouti, où j’ai effectué l’ensemble de ma scolarité jusqu’à l’Université à Djibouti, d’où je suis diplômé d’une Licence Appliquée en Maintenance Industrielle (LAMI). J’ai ensuite poursuivi mes études en France, à l’Université de Perpignan–Via Domitia, où j’ai obtenu un Master en Électronique, Automatique et Informatique (EAI).
À mon retour, j’ai intégré l’Université de Djibouti en tant qu’enseignant en génie électrique. Ce choix était motivé par la possibilité qu’offre l’institution de préparer un doctorat tout en exerçant une activité d’enseignement, grâce à une bourse et un encadrement adapté.
Conscient des défis énergétiques auxquels Djibouti est confronté et de la transition énergétique en cours, j’ai entrepris un doctorat en génie électrique à l’Université de Caen-Normandie, au laboratoire LUSAC de Cherbourg, sous une codirection franco-djiboutienne.
Étant inscrit à temps plein, ma thèse s’est déroulée en alternance entre l’Université de Djibouti et la France, avec un semestre sur chaque site, en parallèle de mes charges d’enseignement. Cette organisation, bien qu’enrichissante, a représenté un véritable défi : s’adapter aux différences climatiques, s’éloigner de sa famille et de ses enfants, tout en maintenant le même niveau d’exigence scientifique.
Ma recherche, centrée sur la modélisation, l’optimisation et la gestion d’énergie d’une centrale hybride à énergies renouvelables combinant solaire, éolien et stockage sur batteries, m’a permis de concevoir une approche de gestion intelligente des flux énergétiques, particulièrement adaptée aux contextes arides et insulaires comme celui de Djibouti.
Qu’est-ce qui vous a motivé à poursuivre une carrière dans les énergies renouvelables ?
Très tôt, j’ai été frappé par le paradoxe d’un pays comme Djibouti — riche en soleil et en vent — mais encore dépendant des importations d’énergie. Cela m’a poussé à orienter mes travaux et ma carrière vers la recherche de solutions locales et durables. J’ai voulu démontrer qu’il est possible, grâce à la science et à la planification, de transformer cette ressource naturelle en levier de développement national.
Vous êtes aujourd’hui Directeur du Laboratoire de Recherche en Énergie et Systèmes Énergétiques (LaRESE). Quel est le rôle du laboratoire ?
Le laboratoire LaRESE a pour mission d’être un pôle d’excellence scientifique dédié à la transition énergétique. Nous y menons des projets sur le solaire, l’éolien, le stockage et l’hydrogène. En tant que directeur, je coordonne les équipes, oriente les axes de recherche et collabore avec le secteur privé. Notre ambition est de faire du laboratoire LaRESE de l’université de Djibouti une vitrine nationale et régionale de la recherche appliquée dans le domaine de l’énergie.
Vous avez également occupé des fonctions de consultant et de coordinateur de projets. Pouvez-vous nous en dire plus ?
En tant que consultant national et coordinateur de projets, j’ai activement contribué à plusieurs initiatives structurantes pour la transition énergétique de Djibouti. J’ai dirigé la rédaction du Pacte National pour l’Énergie, en concertation avec la Task Force interministérielle (MERN, MEFI, MB, EDD) et la Banque mondiale, afin de définir les piliers stratégiques, les réformes prioritaires et les indicateurs de suivi du secteur. J’ai également participé à l’élaboration des normes et protocoles techniques encadrant l’importation et l’installation des technologies solaires pour l’autoconsommation et les mini-réseaux. Dans le cadre du projet de remise en marche de l’usine nationale de production de panneaux solaires TechSol, j’ai assuré la coordination en tant que responsable adjoint, en supervisant la planification, la conformité technique et la mise en service des équipements. Cette expérience, combinée à mes autres missions nationales, m’a permis d’allier expertise scientifique, compétences techniques et coordination institutionnelle. Elle illustre pleinement mon engagement en faveur de la souveraineté énergétique et de la transition durable de la République de Djibouti.
Quelles sont les principales compétences que vous avez développées au fil de votre parcours ?
Au fil de mon parcours, j’ai développé une expertise approfondie en énergies renouvelables, notamment dans la conception, le dimensionnement et l’optimisation de systèmes solaires, éoliens et hybrides avec stockage. J’ai acquis une solide expérience en gestion et coordination de projets énergétiques, de la planification à la supervision technique, en assurant la conformité réglementaire et la performance des installations. Mon parcours m’a également permis de maîtriser la modélisation énergétique, l’analyse de faisabilité et le suivi-évaluation des projets. En tant que directeur de laboratoire, j’ai renforcé mes compétences en recherche appliquée, encadrement d’équipes et innovation technologique. Enfin, mes missions de conseil et de normalisation m’ont permis de développer une forte capacité de coordination institutionnelle, de communication stratégique et de leadership technique au service de la transition énergétique de Djibouti.
Quels ont été les moments forts de votre parcours ?
L’un des moments les plus marquants de mon parcours a été la réalisation de mon rêve d’enfance : devenir docteur en génie électrique. Obtenir ce titre, après plusieurs années d’efforts, de persévérance et de sacrifices, a représenté bien plus qu’une réussite académique — c’était l’aboutissement d’un engagement personnel et professionnel au service du développement énergétique de mon pays. Un autre moment fort a été ma nomination en tant que Directeur du Laboratoire de Recherche en Énergie et Systèmes Énergétiques (LaRESE) à l’Université de Djibouti. Ce poste symbolise à la fois la confiance de l’institution et la reconnaissance du travail accompli, tout en m’offrant l’opportunité de former la nouvelle génération de chercheurs et de faire du laboratoire LaRESE une référence nationale et régionale dans le domaine des énergies renouvelables.
Quels conseils donneriez-vous à un jeune ingénieur ou doctorant souhaitant travailler dans le domaine de l’énergie ?
Je lui dirais avant tout de croire en lui-même et en ce qu’il peut apporter à l’humanité. Le domaine de l’énergie demande de la passion, de la rigueur et une vision tournée vers l’avenir. Il ne s’agit pas seulement de maîtriser des technologies, mais de mettre ses compétences au service du bien commun, en cherchant des solutions durables et accessibles pour tous. Je conseillerais également de ne jamais cesser d’apprendre, de se former continuellement aux nouvelles innovations, et de rester curieux et engagé face aux grands défis énergétiques de notre époque. Enfin, il est essentiel de travailler avec humilité et collaboration, car la transition énergétique est avant tout une aventure collective.





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