Témoignage de NASFI Manel, docteure en génie des procédés et de l’environnement
Merci beaucoup d'avoir accepté l'interview.
Pouvez-vous nous faire part de votre parcours menant au doctorat ?
À l'origine, j'ai suivi une formation en ingénierie spécialisée en génie des procédés. Bien que cette discipline soit souvent associée à des usines nuisibles pour l'environnement et dangereuses, il est important de souligner l'évolution de la situation grâce à des réglementations plus strictes. Aujourd'hui, les nouvelles unités de transformation sont plus respectueuses de l'environnement grâce au contrôle des émissions et plus sécurisées grâce à une maintenance et à des pratiques améliorées. Convaincue que le génie des procédés offre une approche unique pour développer des procédés plus efficaces, j'ai toujours considéré cette discipline comme un moyen de favoriser l'innovation dans divers domaines tels que les nouveaux matériaux, les énergies renouvelables, les biotechnologies et la gestion des déchets, contribuant ainsi à la durabilité. C'est pourquoi, après l'obtention de mon diplôme d'ingénieur, j'ai choisi de me spécialiser dans les procédés de valorisation des ressources renouvelables en poursuivant un master. Ma passion pour la recherche m'a ensuite motivée à entreprendre un doctorat, aspirant ainsi à atteindre le plus haut niveau universitaire.
Comment avez-vous vécu votre expérience de doctorat ?
Faire une thèse en France implique un statut hybride, à mi-chemin entre étudiant et salarié, souvent mal compris par notre entourage. Au début, mes parents pensaient que je continuais mes études et s'inquiétaient de ma situation financière. Ce statut particulier permet d'apprendre à concilier les exigences académiques avec les réalités du monde professionnel, tout en profitant des avantages de la vie étudiante en partageant des moments avec d'autres doctorants et post-doctorants. Mon expérience a été enrichie par un séjour de quatre mois aux Pays-Bas dans le cadre de ma thèse, une opportunité qui m'a permis de découvrir un nouveau pays et de nouer des relations précieuses. Ces années de thèse et ces moments précieux restent gravés dans ma mémoire. Faire une thèse présente certes des défis, car nous avons souvent tendance à considérer la thèse comme le chef-d'œuvre de notre vie et nous nous y consacrons pleinement, parfois un peu trop. On se retrouve seule avec son sujet, dont on devient rapidement la seule spécialiste. Ce sujet devient alors comme notre bébé, que l’on voit grandir petit à petit. C’est pourquoi, à la fin de la thèse, il est souvent difficile de s’en détacher, car on souhaite qu’il soit aussi parfait que possible. Ainsi, le choix du sujet de thèse revêt une importance cruciale, bien plus que l'environnement de travail. Être dans une équipe où les collègues sont bienveillants et où les directeurs de thèse sont à l’écoute favorise considérablement les interactions et le quotidien au laboratoire. Toutefois, il est primordial de garder à l'esprit que l’autonomie, la motivation et l’organisation sont essentielles pour progresser. L'avancement dépend largement de notre implication personnelle, d'où l'importance de choisir un sujet qui nous passionne. Pour ma part, j'ai opté pour la valorisation du bois par pyrolyse rapide, un sujet qui me passionne. Ceci m'a permis de surmonter les obstacles avec détermination. Cependant, je suis consciente que d'autres peuvent rencontrer des difficultés, et j'ai été témoin de collègues abandonnant en cours de route. C'est pourquoi je recommande à ceux qui envisagent une thèse de choisir leur sujet avec soin et de créer des liens dès le début avec des anciens doctorants et post-doctorants pour échanger des stratégies sur la manière de relever les défis.
Est-il nécessaire de réaliser une thèse CIFRE pour travailler dans une entreprise ?
Effectivement, la thèse CIFRE n'est pas obligatoire. Ce type de thèse permet au doctorant de mener ses recherches en collaboration avec une entreprise, offrant ainsi une expérience professionnelle enrichissante et favorisant l'insertion dans le monde industriel. Cependant, de nombreuses entreprises recrutent également des docteurs n'ayant pas réalisé de thèse CIFRE. Dans mon cas, ayant réalisé une thèse fondamentale, j'ai été recrutée par une entreprise du secteur privé. Ce sont les compétences acquises pendant le doctorat, telles que la recherche, l'analyse, la résolution de problèmes et la gestion de projet, qui sont recherchées et valorisées sur le marché du travail, que ce soit dans le secteur académique ou privé. Il est important de souligner que rares sont les cas où l'on travaille sur le même sujet que celui de sa thèse. Pendant la thèse, le doctorant développe une polyvalence et une capacité à faire face à des situations difficiles, compétences appréciées par les employeurs en quête d'innovation. Ainsi, le docteur peut choisir de poursuivre une carrière académique, dans le secteur privé ou même les deux à la fois.
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