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André SCHROTTENLOHER, Chargé de recherche au Centre Inria de l'Université de Rennes.


André SCHROTTENHOLER
André SCHROTTENLOHER

Prix de thèse 2022 du GDR "Sécurité Informatique"

Merci d'avoir accepté l'interview


Peux-tu nous dire quelques mots sur ta thèse ?

Ma thèse s'est déroulée entre 2018 et 2021 au Centre Inria de Paris, où j'ai travaillé sous la direction de María Naya-Plasencia et André Chailloux. Elle portait sur la « cryptanalyse quantique des chiffrements symétriques ».

 

La sécurisation des outils cryptographiques, qui sont à la base de toutes les communications chiffrées, repose en grande partie sur la cryptanalyse. On recherche en permanence des attaques sur les algorithmes existants, et ce, même longtemps après leur publication et leur standardisation. Un chiffrement n'est pas seulement « sécurisé » ou « insécurisé » ; il est plus ou moins digne de confiance selon la quantité de travaux de cryptanalyse dont il a fait l'objet et des résultats obtenus. Ces résultats sont bien souvent des algorithmes permettant d’attaquer des versions affaiblies.

 

Dans ce contexte, on s'intéresse beaucoup à l'impact potentiel d'un adversaire équipé d'un ordinateur quantique. Il n'existe pas encore aujourd'hui de telle machine utilisable en cryptanalyse, mais la cryptographie est une affaire de long terme. Les standards que l'on décide aujourd'hui doivent rester sûrs vingt, trente, cinquante ans ; et c'est pourquoi cette menace est prise très au sérieux.

 

En cryptographie à clé publique, on sait que l'algorithme de Shor permet de compromettre les chiffrements utilisés aujourd'hui. Ils sont en cours de remplacement par de nouveaux algorithmes dits « post-quantiques » : résistants à l'ordinateur quantique. En revanche, en cryptographie à clé secrète, qui est l'autre grand versant du domaine, la situation est longtemps restée plus floue. On sait qu'elle est moins impactée, mais la littérature scientifique sur le sujet ne s’est vraiment développée que ces dernières années.

 

C'est donc sur ce point que j'ai travaillé. Cela m'a amené par exemple à concevoir des algorithmes quantiques pour des « problèmes difficiles » typiques, qui apparaissent souvent en cryptographie et en cryptanalyse. J'ai aussi travaillé sur des cas concrets, par exemple le chiffrement AES. Bien qu'il soit unanimement considéré comme encore sûr contre un attaquant quantique, nous avons pu commencer à quantifier précisément ce niveau de sécurité, comme on le fait depuis des années en cryptanalyse « classique ».

 

Quel a été ton parcours après la thèse ? Quel poste occupes-tu aujourd'hui ?

J'ai soutenu ma thèse en février 2021 et j'ai ensuite effectué un post-doctorat d'un an et demi au CWI (Centrum Wiskunde & Informatica), un institut de recherche en informatique et mathématiques à Amsterdam, aux Pays-Bas. J'ai pu y démarrer de nouveaux projets et collaborations, toujours sur le thème général de la cryptanalyse quantique. En novembre 2022, je suis revenu chez Inria, l’institut national français de recherche en sciences et technologies du numérique, cette fois comme chargé de recherche (en poste permanent). J'ai rejoint l'équipe CAPSULE du centre de Rennes, dont les activités couvrent un large spectre de recherches en cryptographie. Mon temps y est partagé entre la cryptanalyse des algorithmes à clé secrète, l'algorithmique quantique et ses applications en cryptographie.

 

J'ai donc eu la chance de poursuivre dans la recherche académique et de garder des thématiques proches de ma thèse, même si ce champ d'activité continue d’évoluer. Bien sûr, la situation a beaucoup changé par rapport à la thèse puisque c'est maintenant mon travail de proposer de nouveaux projets !

 

Quels conseils donnerais-tu à un(e) futur(e) doctorant(e) ?

C'est une question difficile car l'expérience de thèse varie beaucoup en fonction des personnes, des équipes et des thèmes de recherche. Cela dit, je retiendrai deux choses qui pourront toujours être utiles. Premièrement, bien organiser son temps. En plus de l'activité de recherche, on se retrouve bien souvent à effectuer en parallèle de multiples tâches de natures différentes : enseignement, séminaires, procédures administratives, etc. Toutes ces sollicitations tendent à fragmenter notre emploi du temps et notre attention. Il est donc important de conserver un maximum de temps pour lire des articles, réfléchir aux problèmes, bref, faire de la recherche ! (Cela vaut d'autant plus pour l'après-thèse du côté académique).

 

Deuxièmement, rester curieux. Cela peut paraître en contradiction avec ce que je viens de dire, puisqu'on a besoin de se focaliser sur un sujet précis, et que le temps disponible n'est pas infini. Mais un sujet de recherche n'est jamais totalement isolé ; il se trouve au centre ou au croisement entre plusieurs domaines plus vastes et en perpétuelle évolution. Les séminaires, workshops, conférences (mais surtout les discussions avec des collègues lors des pauses café !) sont d'une grande importance pour garder un œil sur ce qui se déroule aux alentours. Et tout cela débouche parfois sur de nouvelles opportunités.

 

 

 

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